« Carl Menger, entre Aristote et Hayek », de Gilles Campagnolo 14 octobre
Critique non d’actualité mais espérant – certes un peu tardivement - délivrer une opinion moins méfiante que celle formulée par le journal Alternatives économiques, qui ne craint pas d’accuser l’auteur de l’ouvrage de « complicité » – est-ce un crime ? – avec la pensée autrichienne.
Comprendre l’école autrichienne passe par la pensée mengerienne et pourquoi pas par l’ouvrage de Gilles Campagnolo : Carl Menger, entre Aristote et Hayek. Aux sources de l’économie moderne. Plutôt court (199 pages + annexes) mais d’une densité non négligeable, il permet de saisir la personnalité et la pensée d’un économiste encore méconnu en France (bien qu’étant à l’origine de la révolution marginaliste au même titre que Jevons et Walras), auteur en 1871 des Grundsätze (« principes d’économie politique »).
Aux sources de l’individualisme méthodologique
Influencé par Aristote et les Lumières françaises et écossaises, Menger s’est opposé à la fois aux historicistes allemands comme Schmoller, qui considéraient que l’économie pouvait être comprise par l’observation des faits passés, et aux classiques comme Adam Smith, dont la conception de la valeur-travail s’est révélée inadéquate : ce n’est pas le temps accordé à la fabrication d’un bien qui fait sa valeur, mais la subjectivité propre à chaque individu, en fonction de ses besoins. L’économiste a ainsi grandement participé à l’émergence d’une loi générale de l’économie, introduisant les premières bases de l’individualisme méthodologique et proposant une théorie alternative aux deux écoles de pensée jusque là dominantes : c’est « la satisfaction des besoins recherchée au plan individuel qui est la cause du comportement économique de l’homme« . On retrouve ainsi dans ce postulat le paradigme de l’action humaine qui sera développé et élargi quelques décennies plus tard par Ludwig von Mises. Menger a néanmoins refusé l’utilisation systématique (c’est-à-dire allant au delà de l’économie politique) de cet individualisme méthodologique. Mises considèrera pourtant que la pensée mengerienne est praxéologique, notamment celle relative à l’origine de la monnaie.